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L’EMDR intégré dans le traitement des patientes atteintes d’un cancer du sein : une nouvelle étude en perspective au Luxembourg.

Depuis quelques années, la recherche scientifique explore avec un intérêt croissant l’impact des approches psychothérapeutiques et intégratives dans l’accompagnement des patients atteints de cancer. Parmi elles, l’EMDR une méthode initialement développée par Francine SHAPIRO pour traiter le trouble de stress post-traumatique se révèle intéressante. Plusieurs publications internationales ont déjà mis en évidence sa capacité à atténuer les symptômes d’anxiété, de dépression, de douleur chronique, ou encore de détresse émotionnelle chez les personnes vivant avec un cancer. Ces souffrances sont souvent invisibles, mais pourtant elles sont bien réelles et le plus souvent invalidantes, s’ajoutant aux traitements médicaux lourds comme la chimiothérapie, la chirurgie ou la radiothérapie.

Dans ce contexte, le Luxembourg lance pour la première fois une étude clinique consacrée à l’évaluation de l’EMDR dans le traitement du cancer du sein, et plus précisément auprès de femmes atteintes d’un cancer du sein non métastatique. Cette initiative innovante est portée par Vanessa Grandjean, psychologue clinicienne et spécialiste en psycho-oncologie au Centre Hospitalier de Luxembourg (CHL). Elle est menée en collaboration avec une collègue chercheuse du CHU Brugmann à Bruxelles, et bénéficie du soutien de deux institutions reconnues : la Fondation Cancer luxembourgeoise et la Fondation belge contre le cancer.

Une approche centrée sur la patiente et adaptée à ses ressources

L’EMDR se base sur un principe fondamental : le cerveau possède une capacité naturelle à digérer les expériences traumatiques, mais ce processus peut se bloquer lorsqu’une personne est confrontée à un événement perçu comme trop intense ou menaçant. Grâce à des stimulations bilatérales alternées(généralement des mouvements oculaires ou des tapotements alternés suivant un certain protocole comme le GPC), la méthode vise à relancer cette capacité d’auto-guérison psychique, de digestion du psychotraumatisme. Dans le cadre du cancer, l’EMDR permet de traiter les souvenirs douloureux associés à l’annonce du diagnostic, aux traitements, à la peur de la mort, ou encore à l’altération de l’image corporelle.

« L’EMDR peut soulager non seulement les souffrances psychiques, mais aussi les douleurs physiques, ce qui en fait une méthode particulièrement pertinente pour les patients atteints de cancer, souvent confrontés aux deux. Il est cependant essentiel que la thérapie EMDR soit ajustée à l’état actuel de la personne, afin d’éviter toute surcharge émotionnelle », souligne Vanessa Grandjean.

Une étude clinique rigoureuse pour mesurer l’impact réel.

L’étude inclura 50 femmes, réparties équitablement entre le Luxembourg et la Belgique. Toutes sont atteintes d’un cancer du sein non métastatique et suivent un traitement de chimiothérapie. Les participantes sont aléatoirement réparties en deux groupes :

  • le premier bénéficie de séances d’EMDR pendant la chimiothérapie,
  • le second reçoit un accompagnement psychologique classique, basé sur l’écoute et l’expression verbale.

Le protocole expérimental comprend plusieurs temps d’évaluation : pendant le traitement, puis à trois mois et six mois après la fin de la chimiothérapie. Des questionnaires standardisés sont utilisés pour mesurer différents paramètres psychologiques : symptômes anxieux et dépressifs, niveau de stress post-traumatique, qualité de vie perçue, retentissement somatique (douleurs, fatigue), etc.

Il s’agit d’une première au Luxembourg, où l’EMDR est pratiqué depuis moins de dix ans, principalement dans le traitement des traumatismes liés à des violences, des accidents ou des deuils. L’intégration de cette méthode dans le champ de la cancérologie constitue donc un enjeu majeur, tant pour les patientes que pour les institutions de santé. Si les résultats de l’étude, attendus pour 2026, confirment les bienfaits observés dans d’autres pays, cela pourrait ouvrir la voie à une généralisation progressive de l’EMDR dans les services d’oncologie et de soins de support.

Vers une prise en charge globale de la maladie.

La recherche actuelle tend à reconnaître que le cancer n’est pas seulement une maladie du corps, mais une expérience totale qui bouleverse l’identité, les repères, les relations et l’avenir. Il est donc essentiel d’offrir aux patientes une approche intégrative, dans laquelle la dimension psychique n’est pas marginalisée, mais pleinement prise en compte. L’EMDR s’inscrit dans cette logique, en permettant non seulement un soulagement des symptômes, mais aussi une réorganisation plus profonde du vécu traumatique, contribuant à restaurer la cohérence du récit de vie.

À travers cette étude, le Luxembourg affirme ainsi sa volonté d’innover et d’élargir les horizons de la psycho-oncologie, en misant sur des approches fondées sur des preuves scientifiques, mais aussi sur une écoute fine de l’humain. Au-delà des résultats chiffrés, c’est une autre manière de soigner qui se dessine : plus respectueuse, plus ajustée, plus humaine.

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